Journée d’étude de la BnF : Comment préserver et étudier les jeux vidéo… sans y jouer ?

La Bibliothèque nationale de France (BnF) organise le 12 mai 2023 une journée d’étude portant sur les défis complexes liés à la préservation des jeux vidéo à l’ère des jeux en ligne ou nécessitant un accès à Internet. Cette journée d’étude aborde la constitution des archives des jeux vidéo, la manière de jouer à des jeux archivés et la conservation des équipements numériques et informatiques.

Photo de Lorenzo Herrera disponible sur Unsplash

Depuis 1972 et la sortie du jeu vidéo Pong, le marché des jeux vidéo ne cesse de croître soutenu par la multiplication des bornes d’arcade et les premières consoles de salon. En 2020, le marché français des jeux vidéo a représenté 5,3 milliards d’euros selon le bilan annuel du SELL (Syndicat des Éditeurs de Logiciels de Loisirs)[1]. De plus, le sol français compte environ 700 studios de production de jeux vidéo, comme le rapporte le baromètre annuel du Syndicat national du jeu vidéo datant de 2021[2]. La création de jeux vidéo est donc un moteur de l’industrie française du divertissement. La BnF au titre de l’extension du dépôt légal en 1992, s’est vu confier la tâche d’intégrer dans ces collections patrimoniales des jeux vidéo. Ainsi, en 30 ans, plus de 20.000 jeux ont intégré les collections de la bibliothèque et sont désormais consultables sur le site François-Mitterrand. 

David Benoist, adjoint au chef du service Multimédia, chargé de collections jeux vidéo explicite dans un article[3] paru dans le magazine « Chroniques », les difficultés de conservation et de collecte pour la bibliothèque. En effet, la collecte et la conservation des jeux vidéo posent de nombreux problèmes techniques. Tout d’abord, les archivistes font face à la problématique de la pérennité des supports. Les bandes magnétiques, les cartouches, les disques optiques mais également les consoles ont des durées de vie limitées. Par ailleurs, les jeux récents demandent souvent une connexion à Internet pour pouvoir être lancés. Cette connexion, imposée par les studios de jeux, vise à assurer les mises à jour périodiques, les mesures de protection des jeux ou encore à pratiquer les jeux multijoueur nécessitant, par nature, une connexion à Internet.

C’est par des procédés d’émulation que la BnF lance des jeux anciens sur des machines récentes. Ce procédé d’émulation doit être mis à jour au fil et à mesure des avancées technologiques. En parallèle des jeux, la bibliothèque a constitué un patrimoine vidéoludique en collectant les traces et témoignages d’usages des jeux vidéo. Ainsi, la BnF collecte des archives provenant de tout support :

– Des archives papiers comme la presse spécialisée dans les jeux vidéo.

– Des archives web comprenant des sites, des blogs, des forums ou des vidéos Youtube ou Twitch.

– Des archives audiovisuelles.

La journée d’étude du 12 mai, propose une réflexion scientifique autour du dépôt légal, la préservation et la constitution des archives autour des jeux. Parmi les intervenant.es, Stéphanie Mader, maîtresse de conférences au CNAM (Centre d’études et de recherche en informatique et communications) explique l’intérêt pour les chercheur.es de lire le code source des jeux vidéo, tandis que Mathieu Triclot, maître de conférences en philosophie des techniques, aborde la question de la conservation. Une table ronde sur les jeux vidéo et les archives de la conception explore, quant à elle, la manière de capturer les intentions et les savoir-faire des concepteur.rices de jeux. La journée d’étude se poursuit avec une réflexion sur la place du jeu vidéo dans le dépôt légal du web et une table ronde sur les vidéos de jeux sur Internet, avec Geoffroy Gawin, maître de conférences à l’Enssib (École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques), Pauline Brouard, doctorante et chargée d’enseignement à l’Université de la Sorbonne, Anna Rivière, doctorante en SIC (Sciences de l’Information et de la Communication) et UX Researcher à Ubisoft, Boris Urbas, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, à l’Université Bordeaux Montaigne. Enfin, la journée se conclut par une étude sur les critères de préservation, ainsi que par un retour d’expérience sur le projet d’archivage des jeux vidéo suisses nommé : Pixelvetica.

Cette journée d’étude est l’occasion pour les professionnel.les, les chercheur.es et les passionné.es de jeu vidéo de discuter des enjeux de préservation des jeux vidéo et de l’importance de constituer des archives de la jouabilité pour témoigner de l’histoire du jeu.

Pour suivre la journée d’étude en direct sur Youtube, le lien est disponible ici

par Sami Dendani,

ingénieur d’études, Observatoire des publics et des pratiques de la culture

[1] Bilan annuel du SELL (Syndicat des Éditeurs de Logiciels de Loisirs), consulté le 09/10/2023, disponible ici.

[2] Baromètre annuel du Syndicat national du jeu vidéo, consulté le 09/10/2023, disponible ici

[3] David Benoist, Article paru dans Chroniques n° 97, avril -juillet 2023 »